SAUVETAGE
Saisie record dans une ferme éducative
C’est grâce, si l’on peut dire, à des années de loyers impayés que la propriétaire des lieux s’est décidée à déposer plainte contre sa locataire qui gérait les 700 animaux de toutes sortes présents sur les lieux.
Cette intervention devait être la dernière d’une longue série. Habituée des faits, la locataire a déjà été expulsée des Alpes-Maritimes et le l’Aude pour des raisons similaires. Plusieurs interventions avaient eu lieux pour retirer environ 180 petits primates entassés dans l’habitation de cette personne avec les conséquences que l’on connaît. Aujourd’hui, la locataire est expulsée de la partie « parc » et il y’a plus de 700 animaux a prendre en charge.
Une intervention sous haute tension
Il fait déjà chaud quand les équipes de la Fondation Assistance aux Animaux se présentent sur place. Certains sont venus de loin pour participer à cette importante intervention dans un petit village à coté d’Aix en Provence.
C’est accompagnés des gendarmes, de policiers de l’environnement ainsi que d’agents cynophiles et du peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie que les soigneurs arrivent sur la propriété. Une lourde escorte qui se justifie : la maîtresse des lieux ne compte en effet pas laisser les associations se saisir de « ses » animaux comme ca. Elle a donc conviés tout un comité d’amis de sa fille, des jeunes venus des quartiers nord de Marseille, afin de tenter d’empêcher cette saisie, ou au moins d’entraver son bon déroulement.
Peine perdue, malgré nombre de palabres assorties d’une menace de suicide, les jeunes seront évacués et la locataire sommée de laisser les associations intervenir, ce qu’elle ne fera d’ailleurs pas, tentant au maximum d’empêcher la saisie des animaux.
C’est un endroit quasi à l’abandon que découvrent les animaliers. Des amas d’objets diverses tels que des gamelles vides ou moisies, des cages de transports, des volières rouillées jonchent le chemin qui mène au parc où se trouvent les animaux.
Les jeux pour enfants de cette ferme dite éducative sont dégonflés, sales, poussiéreux, signe que l’activité de cet établissement a cessé depuis déjà bien longtemps.
Wallabys, lamas, chevaux racés, cochons d’Indes, lapins, oiseaux de toutes sortes, daims, chèvres, nandous, oie, poules, cochons, tortues, canards et autres animaux sont là. Les équipes se séparent et l’intervention peut enfin commencer.
Un spectacle désolant
Au premier abord, les animaux paraissent en bon état. Sous les plumes, la maigreur ne se voit pas. Mais en inspectant mieux les enclos on se rend vite compte que la plupart n’ont ni eau, ni nourriture. Et a mieux y regarder, ils sont très maigres. Certains, comme les daims ou les oies, sont même particulièrement squelettiques. D’autres sont blessés et laissés sans soins comme les jeunes chevaux ou encore un pauvre daim maigre et borgne. Enfin, la plupart sont parasités et on aperçoit les puces et les tiques sans avoir besoin de s’approcher bien près. Quasiment tous sont infestés de vermine.
Les enclos sont particulièrement arides. Il n’y a pas un brin d’herbe qui y pousse et le sol n’est que poussière. Les abreuvoirs, lorsqu’ils ne sont pas vides, contiennent une eau stagnante verdâtre malodorante. Des algues vertes en recouvrent le fond. Les animaux semblent avoir faim. Tous s’approchent des grillages à la recherche de nourriture. Deux salariés seulement sont présents pour s’occuper des centaines d’animaux présents. Ils n’ont pas dû manger tous les jours, c’est certains, et à en juger par leur maigreur et la vase puante au fond des abreuvoirs témoigne qu’ils n’ont pas du boire non plus.
Les enclos, cadenassés par la locataire pour éviter l’enlèvement des animaux, sont forcés à l’aide de pinces et l’intervention commence dans un climat difficile.
Action
Tout d’abord, capturer les wallabys. Ces petits kangourous disposent d’une force impressionnante dans les pattes et font des bonds desespérés, allant jusqu’à sauter les clôtures et se retrouver dans les autres parcs. Mais rien n’arrête les associations qui à force de ténacité et grâce à leur expérience parviendront à tous les attraper, anticipant leurs acrobaties et leurs changements intempestifs de trajectoires.
Vient le tour des lamas, encore vifs malgré leur mangeoire vide depuis on ne sait combien de temps. Certains, plutôt dociles, peut-être malade se laisseront attraper sans difficultés tandis que d’autres très craintifs donneront du fil à retordre aux soigneurs, allant jusqu’à leurs cracher dessus en guise de défense. Sans doute ne savent-ils pas qu’ils partent là pour une vie meilleure.
De la ténacités, les soigneurs en auront également besoin pour attraper les centaines d’oiseaux entassés dans des volières crasseuses jamais nettoyées. Les pauvres sont tellement assoiffés que lorsque Cécile, soigneuse à la maison de retraite d’Assistance aux Animaux entre avec un seau d’eau pour les abreuver, ils se jettent littéralement dedans afin d’étancher leur soif. C’est la première fois que je vois ça confiera t elle. D’ordinaire, les oiseaux stressent lorsqu’on entre dans leur volière, ils s’éloignent autant qu’ils peuvent, ceux-là n’ont visiblement pas bu depuis longtemps.
Emus par cette scène, les soigneurs auront à cœur de nourrir et abreuver chacune des pauvres bêtes. Ils auront ainsi l’occasion de constater ce triste spectacle avec quasiment tous les animaux. Malgré le stress que peut leur engendrer une capture, tous se jettent sur l’eau et la nourriture dès qu’elle est mise à leur disposition, oubliant tout ce qui se passe autour.
C’est dire si cette intervention est arrivée à temps pour ceux là au moins. Qu’aurions nous découvert si nous étions venus quelques semaines plus tard ?
Des vivants… et des morts
Certains animaux, les plus fragiles, les plus faibles, ont déjà succombés. Des cadavres de lapins, d’oiseaux et de cochons d’Inde seront retrouvés sur le sol. Les petits corps ont été laissés sur place, et les vivants partagent leur espace. Vision sordide que celle de ce lapin tenant compagnie au cadavre de son compagnon de fortune, ou cette maman cochon d’Inde protégeant son bébé mort.
En dehors du parc des animaux, dans un petit coin de la propriété, une petite cage sale et malodorante exposée en plein soleil. Jean-Luc, animalier au refuge de la Fondation Assistance aux Animaux à Villevaudé en sortira un adorable furet tout étourdi par la chaleur. Lui non plus n’avait ni eau, ni nourriture et comme les autres animaux, assoiffé, il a absorbé toute sa gamelle d’eau en une seule fois.
Dans un coin du parc, au bout d’un petit chemin, un bloc de clapiers à lapins insalubres et puants contient des dizaines de petits prisonniers assoiffés eux aussi. Il y’en a de toutes tailles, de tous âges, des mâles et des femelles engendrant une prolifération incontrôlée.
En face, un groupe de dindons partagent leur enclos avec des cochons chinois. Les deux femelles ont chacune une portée et sont en plus gestantes. Malgré cela, l’enclos est désespérément vide de toute eau ou nourriture. Les cochons sont affamés. Bien qu’effrayés, ils se disputent les œufs que Cécile leur apporte pour leur redonner un peu de force. L’un d’entre eux n’a même plus la force de se lever. Il gît dans une sorte de cabanon en pierre, couché sur le flanc. Les autres se précipitent sur l’eau qui est mise à leur disposition, vidant le petit abreuvoir en quelques secondes à peine. Il en faudra deux autres pour étancher leur soif. Le cochon le plus faible, très déshydraté, parviendra finalement à se lever, puisant dans ses dernières ressources pour aller boire lui aussi.
Non loin de là, des volières contenant des dizaines de gallinacés de tous types (Poules, coq, faisans…) seront méthodiquement vidés et leurs occupants répartis dans différents parc des alentours, pour d’autres dans les refuges de la Fondation Assistance aux Animaux.
Des espèces protégées
Deux jours d’interventions seront nécessaires pour faire évacuer la totalité des animaux que contenait le parc.
Malheureusement, avertie de la saisie qui allait être opérée comme l’oblige la procédure, la locataire en a profité pour « mettre à l’abri » dans sa propriété les animaux ayant le plus de valeur marchande afin d’empêcher les associations d’y avoir accès. Perroquets Aras, wallabys albinos, grues couronnées… Une centaine d’animaux au total manquent à l’appel, dont notamment des chiens (bouledogues anglais, carlins et …) dont elle ferait en plus l’élevage dit-elle.
Des espèces protégées par la Convention de Washington seront également aperçues comme des maras, aussi appelé lièvre de Patagonie, classés dans la Liste rouge de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature comme espèce « Quasi menacé ». Pas même dissimulés. Sûre de son bon droit, l’occupante des lieux les a simplement laissés sur son terrain privé attenant à la propriété. Malgré l’absence de papiers en règle de ces animaux, malgré le fait qu’ils se trouvent tous dans la liste des animaux à saisir et bien qu’ils soient juste sous nos yeux et ceux des gendarmes qui ne peuvent les ignorer, nous n’auront pas l’autorisation de repartir avec eux. Toute l’argumentation et les protestations des soigneurs n’y feront rien, ces animaux protégés par la loi resteront sur place sur l’ordre des gendarmes.
Une affaire à suivre
Difficile pour les soigneurs de la Fondation Assistance aux Animaux de laisser ces pauvres animaux à leur triste sort. Mais que faire lorsque les autorités choisissent de fermer les yeux ?
Les soigneurs de la Fondation Assistance aux Animaux sont obligés de laisser derrière eux une pauvre chienne bouledogue anglaise au regard à vous faire pleurer. Trouvée dans une minuscule cage rouillée et souillée, la patte arrière déboitée, haletante en plein soleil sans eau ni nourriture. Nous aurons seulement le temps de lui mettre de l’eau et de lui prodiguer quelques caresses puis nous seront contraints par les gendarmes à quitter cette partie de la propriété.
Toutes les tentatives pour la récupérer seront vaines. Les soigneurs parviendront seulement à convaincre les gendarmes d’aller rappeler à la locataire qu’il est interdit de détenir un chien de la sorte. Cette dernière rentrera le pauvre animal, mais nous l’apercevront à nouveau dans cette même cage le lendemain.
Que dire des autres chiens parqués dans le jardin de la propriété ? Ils continueront sans doute à reproduire encore et encore, jusqu’à ce que nous parvenions à tous les récupérer.
L’affaire n’en restera pas là…
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